CARTE BLANCHE – Les « Premier(s) Pas » de Rhiannon Morgan avec Abou et Nawal Lagraa

par Marie-Laure Rolland

720 danseurs avaient posé leur candidature. Seuls 10 ont été retenus. Parmi eux, la danseuse Rhiannon Morgan. Depuis le 9 novembre 2019, elle participe au projet « Premier(s) Pas » au sein de la compagnie La Baraka à Annonay (F). Il s’agit de neuf semaines de création et de cinq semaines de formation, avec à la clé la participation à un spectacle qui partira en tournée européenne. La Glaneuse a offert une Carte blanche à Rhiannon pour qu’elle partage, semaine après semaine, son expérience.

Avant-propos

Ma première rencontre avec Abou et Nawal Lagraa date de mars 2018 à la Chapelle St Marie à Annonay, lors de la résidence artistique d’Andrea Rama, lauréat de la bourse de création chorégraphique du Fonds Culturel National et du Grand Théâtre de la Ville de Luxembourg. Durant notre séjour à Annonay, j’ai pu découvrir en répétitions le travail d’Abou Lagraa, un univers et un langage chorégraphiques fascinants, émouvants et puissants. Je voulais en savoir plus, m’y immerger et apprendre aux côtés de ce grand maitre de la danse. J’ai donc gardé contact avec la compagnie.

Après leur passage au Grand Théâtre de Luxembourg au printemps 2019 avec la pièce Wonderful One, Abou m’a informée de son nouveau projet et de l’audition qui aurait lieu afin de recruter les 10 danseurs de cette nouvelle création. Après une pré-sélection de 720 danseurs, j’ai été parmi les 20 danseurs choisis pour passer l’audition à Annonay où pendant 3 jours nous étions logés et nourris. Ces 3 jours d’audition m’ont permis de mieux connaître ce nouveau monde chorégraphique en découvrant le vocabulaire unique de Nawal et Abou Lagraa au sein de la compagnie La Baraka.

Au final, nous étions 10 danseurs a être retenus avec des parcours artistiques variés comme le Hip-Hop, le Break dance parmi d’autres, unis par notre passion pour la danse, le partage, le besoin de s’affirmer en tant qu’artiste, d’explorer et de découvrir de nouveaux horizons, et surtout l’envie de s’immerger dans le travail de ces deux chorégraphes.

 Premier(s) Pas est un projet inédit créé par la Compagnie La Baraka et les Fondations Edmond de Rothschild. Il s’agit de 9 semaines de création partagées entre Nawal et Abou Lagraa, d’un spectacle avec une tournée internationale, d’une formation d’accompagnement de 5 semaines axée sur les besoins des danseurs interprètes : coaching de communication, histoire de la danse, gestion de projet, cours techniques parmis d’autres.

Semaine 1 – du 9 au 17 novembre 2010

Notre première semaine a débuté le samedi 9 novembre 2019. Les 9 danseurs venus de tous les coins de France, et moi du Luxembourg, sommes arrivés à Annonay. Nous nous sommes installés dans les luxueux appartements mis à disposition par la compagnie La Baraka. Je suis la seule femme de l’appartement entourée par trois charmants colocataires !

La journée du dimanche s’est déroulée avec des prises de mesures par la créatrice de costumes Charlotte Pareja et une interview pour le documentaire qui est en création autour du projet.

Lundi matin, à 9h30, nous étions tous au studio prêts à commencer cette première journée de création avec Nawal, en pleine forme et curieux de tous ces nouveaux échanges .

Le bilan de cette première semaine :

Nous avons appris du matériel chorégraphique, improvisé sur plusieurs thèmes, fait des essais afin de structurer les phrases chorégraphiques apprises. Une semaine intense non seulement physiquement mais aussi mentalement vu qu’il y a  eu beaucoup d’informations à intégrer et a digérer.

J’ai eu beaucoup de questionnements, de peurs et d’angoisses dans mes propositions artistiques et ma manière de travailler. Il n’est pas facile, en n’ayant jamais travaillé avec quelqu’un, de connaître sa manière de créer et d’être à la fois à son écoute et à l’écoute du groupe . Je suis très reconnaissante envers Nawal qui, pendant cette semaine, a été là pour m’entendre et m’encourager ainsi qu’à Ludovic Collura, le répétiteur et « ange gardien » de la compagnie. Il est rare, dans le milieu de la danse, de prendre un temps de contact humain dès les premières répétitions où il s’agit encore des premières rencontres.

Cette semaine m’a permis de lâcher prise, de remettre en question ce que je croyais constitutif d’un/une « danseuse professionnelle », cette peur et auto-critique constantes que je m’inflige en croyant que je ne suis pas assez bonne, pas assez créative, pas assez spontanée etc. J’ai pu me focaliser plutôt sur le simple fait que je danse parce que cela me fait plaisir, que c’est un besoin primaire pour que je puisse m’exprimer et exister.

Je remercie Marie-Laure Rolland de La Glaneuse pour cette opportunité de partager avec vous mes expériences tout au long de cette création, en espérant que cela puisse nourrir les futures générations de danseurs – du Luxembourg et d’ailleurs – avec des informations concernant le métier de danseur/interprète .

À bientôt !

Rhiannon Morgan participe au projet « Premiers Pas » à Annonay (photo: RM)

 

Semaine 2 – du 18 au 24 novembre 2019

Après un week-end calme à Annonay, entre un après-midi chez notre costumière Charlotte Pareja et des ballades dans la forêt enneigée, le retour au studio lundi matin s’est fait avec enthousiasme et un mélange de curiosité et de peur pour la prochaine étape de création avec le chorégraphe Abou Lagraa.

Je me suis souvent demandée, au long de mon parcours, ce que voulait dire être « artiste chorégraphe »? Ce terme vient du grec « xoros » qui signifie danse et « grafo » qui signifie écrire. Le dictionnaire définit ainsi chorégraphe comme un:
« Artiste qui compose des danses et des ballets », une définition extrêmement limitée pour Abou Lagraa, cet artiste incroyable qui, au long de ces 23 ans de carrière, a créé 27 pièces pour sa propre compagnie ainsi que pour l’Opéra de Paris et le Ballet de Genève, entre autres.

Après notre cours matinal – pris en charge par notre ange gardien répétiteur Ludovic Collura – nous voilà tous assis en train d’écouter attentivement de quoi Abou s’est inspiré pour cette nouvelle création : les images dont il se sert pour creuser dans ses émotions ; des mots clés tels que le désir, la passion, la sensualité, l’instinct ; le choix des costumes ; la création lumière ; le son inspiré de Bach, le compositeur baroque allemand. Tout est pris en considération.

Pendant ce moment d’échange avec la compagnie, me voilà comme une enfant, éblouie, inspirée avec mon imaginaire qui va à 100 à l’heure! Il va falloir être à la hauteur des exigences de ce travail technique précis, avoir la maturité, l’expression corporelle et psychique et, surtout, être focalisée sans relâche pendant les répétitions. De nature dure et exigeante avec moi-même, me voici dès le premier jour face  à mes pires démons d’auto-critique et d’insécurité, en ayant aucune autre solution que de les affronter et de faire confiance tout d’abord à Abou et au groupe de danseurs.

Au cours des jours qui passent, la fatigue se fait sentir, et avec cet état de corps, il m’est difficile de rester concentrée et de m’investir comme je le voudrais et comme un tel travail artistique l’exige. Jeudi après-midi, entre essayer de proposer de nouvelles qualités d’interprétation et de vocabulaire chorégraphique, mais aussi être à l’écoute de ce qui se passe autour de moi, je perds le fil. Je me retrouve dans un vide, en ne sachant plus comment procéder.

Ce blocage, Abou le voit et le ressent, pas seulement en moi, mais notamment avec les autres membres de la compagnie. C’est alors en toute simplicité et sincérité  qu’il sort sa baguette magique et prend du temps pour nous écouter en nous posant la question: “ Qu’est ce que ça veut dire, pour toi, d’être danseur? » Je me dis que c’est une coïncidence étrange, vu que j’ai commencé la semaine en me demandant ce que veut dire “chorégraphe” et que maintenant il s’agit de définir être “danseur”! Les réponses qui ont été offertes par le groupe, ainsi que la possibilité de partager mon malaise en ne sachant pas comment garder un équilibre dans le processus de création, ont abouti à une réponse simple :

“Le danseur est, tout d’abord, un individuel au sein d’un groupe”.

Sur ce, nous avons terminé la journée avec une petite fête, vu que c’était le 50ème anniversaire de notre administratrice Magdalena Marek. Un moment de partage d’équipe, en dehors du contexte des répétitions, et surtout un moment de connexion entre nous-mêmes, dansant avec une coupe de champagne à la main.

Vendredi, la journée s’est terminée avec notre toute première répétition publique, une initiative mise en place par la Cie La Baraka afin que le milieu scolaire puisse avoir accès au milieu artistique et partager avec les artistes un moment de leur quotidien. Ces adolescents ont été timides et absents lors des échanges, même après tous les efforts d’Abou pour initier une conversation en leur posant des questions.

Sans rentrer dans un débat socio-pédagogique, ce constat pose fortement des questions sur cette nouvelle « génération Instagram » qui n’arrive pas à communiquer, à s’exprimer et à s’ouvrir au monde extérieure. Il est évident que le développement d’un esprit critique est primordial et si ceci n’est pas encouragé au sein du milieu scolaire, comment ces jeunes deviendront autonomes et responsables du monde dans lequel ils vivent?

En ayant grandi au Luxembourg, je ne me souviens d’aucun échange artistique pendant ma scolarité, sauf pendant nos cours au Conservatoire sous le regard bienveillant de Mme Eiffes et Mme Hellinckx. Il faudrait y réfléchir, afin de trouver des moyens et des outils pour que les métiers artistiques soient incorporés dans le cursus scolaire.

Bilan de cette deuxième semaine:

Une semaine chargée émotionnellement et physiquement, pleine de doutes, de questionnements, de réponses et surtout de l’amour en abondance par cette compagnie extraordinaire qui offre à tous ceux qui sont en contact avec elle de s’ouvrir à la beauté, la fragilité, la sincérité et la force de cet art non verbal qu’est la danse… parce que tout simplement :

« La danse est l’une des formes les plus parfaites de communication avec l’intelligence infinie ». P. Coelho

Rhiannon Morgan participe au projet « Premiers Pas » à Annonay (photo: Compagnie La Baraka)

 

Semaine 3 – du 25 novembre au 1er décembre 2019

La semaine a commencé avec des objectifs bien précis pour Nawal Lagraa. Après notre cours matinal avec notre ange-gardien répétiteur de la compagnie Ludovic Collura, elle a passé un moment pour expliquer et discuter de ses envies et besoins pour la pièce, que ce soit sur un plan technique ou d’interprétation artistique. Nous avons pu ainsi accéder à son univers unique, riche en émotions et questionnements sur l’individu : entre recherche personnelle,  rôle dans la société, hypocrisie, malaise et manque de confiance en soi. Elle montre aussi comment, parmi tous ces obstacles, il est possible  que chacun puisse y trouver son authenticité, afin de se mettre à nu et de s’accepter tout simplement pour ce qu’on est.

Cette semaine était donc focalisée sur une recherche profonde qui m’a amenée plusieurs fois à fondre en larmes, sans savoir pourquoi, un relâchement  sûrement de toutes les couches que je porte afin de me sentir acceptée et aimée. Ainsi, je me suis aperçue qu’au fil de ma carrière de danseuse, j’ai souvent dû me présenter en tant que bosseuse, énergétique et extrême, qui  surtout n’a peur de rien et y va à 100 pour cent TOUT le temps, sans aucun  moment de relâche. En tout cas, c’est ainsi que je voulais paraître et considérais  les critères afin d’être reconnue et avoir du succès en tant que « danseuse professionnelle ».

Au cours de la semaine et des filages de la chorégraphie, Nawal était présente pour aider chaque danseur à puiser encore plus profondément. Vu l’exigence physique et émotionnelle de la pièce, il n’était pas possible de faire autrement que d’y plonger complètement afin de creuser au plus profond de soi même.

Le challenge de la semaine, avec nos deux répétitions publiques (écoles primaires et Tout public), était de pouvoir gérer la fatigue, les courbatures et la frustration d’avoir un corps qui demande son temps de récupération mais qui ne l’a pas. Cette balance entre la logique, l’âme et le corps pour qu’ils puissent être en harmonie est un réel combat chaque jour, encore plus apparent pendant des créations artistiques où nous sommes chaque instant face à nous mêmes.

De cette semaine forte en émotions, je garde surtout l’aspect humain et l’encouragement de la part de toute l’équipe artistique. Comme dans la vie, c’est pendant les moments les plus durs, où on est épuisé émotionnellement, qu’un réel contact et qu’une réelle ouverture se fait avec notre environnent. Je tiens à a remercier mes collègues qui ont été là pour partager, discuter et donner un câlin. Je tiens aussi à remercier Nawal, Abou et Ludovic qui ont instauré cette atmosphère de confiance et de non jugement dans leurs créations afin qu’on puisse aller jusqu’au bout de nous-même sans peur et avec générosité. Parce que tout d’abord, nous sommes humains et pas des machines à exécuter des pas de chorégraphie. Il est rare de travailler avec des chorégraphes qui s’intéressent et s’investissent autant dans le parcours de leurs interprètes.

J’espère de tout cœur que certains se retrouveront dans ce troisième volet de mon journal de bord et que ce moment de partage contribuera à la poursuite de votre quête de vérité.

« Dansez dansez sinon nous sommes perdus ! »  Pina Bausch

À bientôt !

Semaine 4 – du 2 au 8 décembre 2019

De retour en studio pour cette nouvelle semaine, Abou Lagraa a commencé avec exigence, vu que la fin de la période de création approche.

Bien que j’aie profité d’un week-end calme, le corps, lui, a besoin de plus de temps de récupération et mon grand challenge a été de gérer ma fatigue tout en étant productive et disponible pendant les répétitions. Cet état de fatigue a créé une frustration qui, au fil des jours, n’a cessé d’augmenter ainsi qu’un sentiment de ne pas me « donner au maximum » et d’être une danseuse « paresseuse ». Bien évidement, plusieurs fois en répétitions, toutes ces émotions m’ont épuisée psychiquement et ceci a eu comme répercussion un manque de précision dans l’exécution de la chorégraphie.

Cet état fragile nous le ressentons tous et Abou, en réel leader d’équipe, a entamé un discours direct afin de nous motiver à surpasser nos limites à la fois physiques et psychologiques. Grâce à cette approche, des miracles se sont produits, des chorégraphies solos de chaque danseur de la compagnie sont ressorties avec une puissance et une authenticité inouïe.

Comme quoi, c’est justement quand on se sent à bout, vide et épuisé qu’un trésor peut être découvert. Je suis reconnaissante d’avoir eu l’espace et la confiance d’Abou, ainsi que de notre répétiteur « ange gardien » Ludovic, pour accéder à une puissance qui se cache au fond de moi.

Le mercredi, comme chaque semaine, nous avons accueilli le public lors d’une répétition publique, un rendez vous hebdomadaire avec un public fidèle, curieux d’en connaître plus afin de découvrir le « back stage » de la danse. Pour nous artistes, ce moment de partage nous permet de nous mettre à « nu » et de gérer l’angoisse d’un œil extérieur  pendant le moment fragile de la création. Nous n’avons eu que des retours positifs et encourageants, un rappel à la réalité vu que, après toutes ces heures passées en studio, il est difficile de rester objectif avec soi-même et de prendre du recul avec le travail.

Cette semaine avec ses moments de doute, jugement et exigence envers moi-même, m’ont appris la valeur de la persévérance et du courage. Le corps n’est pas une machine, ni les danseurs des robots à reproduire des mouvements.

Tout d’abord nous sommes humains et être humain signifie accepter et vivre toutes les émotions « bonnes » ou « mauvaises » qui surgissent, sans les juger. Au fil des semaines je me découvre, je me réinvente et surtout mon envie de puiser au maximum de moi-même ne cesse d’augmenter. Merci à cette compagnie unique pour ce voyage de liberté et à vous, très chers lecteurs, pour cette possibilité de partage.

Rhiannon Morgan participe au projet « Premiers Pas » à Annonay (photo: Compagnie La Baraka)

 

Semaine 5 – Du 9 au 15 décembre 2019

Les semaines passent à une vitesse incroyable et nous voici à l’avant-dernière semaine de création ! Afin de maximiser ce temps précieux, qui n’est jamais suffisant, nous avons commencé la semaine avec la création de Nawal et terminé avec celle d’Abou. En quelque sorte du « 2 en 1 » ou un « best-off » de l’équipe Lagraa, toujours sous l’œil bienveillant de notre répétiteur Ludovic.

Une semaine où les deux pièces commencent à se définir, ce qui nous permet, en tant qu’interprètes, de rentrer plus en profondeur sur les deux propositions artistiques et d’y apporter notre couleur. Ceci était évident lors de notre répétition publique où les spectateurs nous ont donné des retours enthousiastes et encourageants. J’ai eu, à cette occasion, la possibilité de répondre à une question du public qui nous a demandé : « Comment c’est de travailler avec autant de monde ? Comment est-ce que ça se passe ? » Une question pertinente, vu que nous sommes 10 danseurs qui ne se connaissaient pas avant, venus d’univers artistiques et personnels différents, qui ont été choisis afin de travailler ensemble.

Les conditions qu’offrent Abou et Nawal sont rares dans le milieu artistique.  Les danseurs ont la possibilité de se focaliser à 100 pour cent sur la création en étant logés sur place, sans devoir prendre des transports en commun, etc. Pourtant, les relations humaines dans notre groupe ne sont pas tous les jours faciles à gérer. En effet, c’est à travers l’autre que l’on découvre ses propres limites, préjugés et manque de tolérance envers les différences.

Je suis la première à l’avouer : il est bien plus facile de rejeter la faute sur les « autres » afin d’éviter de prendre la responsabilité de la qualité de nos relations et de la réalité qu’on s’auto-fabrique,  avec notre perception égocentrique limitée.

C’est justement là où se trouve le pouvoir de la danse, car le petit moi s’apprête à rendre service à quelque chose de plus grand qui est de s’ouvrir et de communiquer avec un public, de partager en toute sincérité et générosité, de lui faire découvrir de nouvelles sensations, expériences … pour qu’il puisse rentrer en contact avec ce miracle qui est simplement d’être vivant, de ressentir et, pour un instant, se laisser libre d’imaginer comme un enfant, de créer de nouveaux mondes sans limites.

Cependant, afin de permettre au spectateur d’avoir accès à cette liberté, le devoir de l’interprète est de se surpasser et d’être ancré, confiant, et dans le moment présent. Abou et Nawal nous le répètent constamment en répétition : « rendre le mouvement vivant », « laisser la musique nous emporter » ou bien « remplir notre danse ». Un challenge et des questions à se poser à chaque  moment de notre vie, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du studio, afin de peut-être garder notre curiosité et état d’âme au moment présent où TOUT est possible.

Je conclus ce partage avec ce qui, pour moi, a été le moment de grâce de cette semaine: quand Abou nous a dit que pour rentrer dans sa danse il fallait « tout lâcher afin d’attaquer»… Donc je lâche tout pour attaquer la semaine prochaine avec mon dernier volet sur cette période de création.

Une répétition ouverte au public du projet « Premier(s) Pas » à Annonay (photo: Cie La Baraka)

 

Semaine 6 – Du 16 au 22 décembre 2019

Voilà déjà la dernière semaine de création !

Le programme a commencé avec Abou qui a mis l’accent sur les parties solos de la pièce. Je me retrouve donc avec les autres danseurs dans un processus de recherche afin d’établir une relation entre mon solo, qui parle de solitude et de vulnérabilité, et le groupe. L’improvisation est un outil que beaucoup de chorégraphes utilisent, mais chacun différemment. Pour Abou, il s’agit tout d’abord d’être dans le moment présent, de puiser dans les émotions et le ressenti, et de casser toutes habitudes ou codes de mouvement déjà installés dans le corps.

De nature curieuse et exigeante envers moi-même, j’ai essayé à tout prix d’arriver à un « résultat » que je croyais être ce qu’Abou attendait de moi. J’étais donc dans la démonstration et non dans le ressenti. Comme conséquence, mes mouvements devenaient vides et je me forçais dans une corporalité qui faisait mal à mon corps et qui ne communiquait rien… Abou, toujours avec sa bienveillance et patience, a su quand me pousser et quand me laisser dans ma recherche afin d’aboutir, le dernier jour au studio, à un solo à la fois libre, sincère et avec une qualité de mouvement que je découvrais pour la première fois.

La période de création avec Abou s’acheva avec notre répétition publique devant une salle pleine d’un public fidèle et curieux de notre travail.

Les deux derniers jours de la semaine, nous avons poursuivi la création de Nawal. Elle a mis l’accent sur le travail de détail, de précision et de compréhension de tous les états émotionnels exigés pendant la chorégraphie. Ceci a abouti à un filage de la pièce vendredi après-midi où les danseurs, malgré la fatigue et les différentes blessures, ont pu aller au-delà des exigences «techniques » de la chorégraphie; afin d’y entrer et de la vivre. C’est un moment magique, où le temps scénique passe dans une autre dimension et où, en tant qu’interprètes, nous sommes en connexion avec une force beaucoup plus grande que notre petit « moi ».

 Ainsi se sont achevées nos six semaines ensemble : sur ce coup de grâce, avec une équipe qui a appris à se connaître, qui a surmonté ses différences et qui en ressort unie. Que dire de plus qu’un grand merci à tous ceux qui ont fait partie de ses six dernières semaines, à Margot J.Libanga pour son feedback et corrections pendant le processus d’écriture de ces articles.

Rhiannon Morgan participe au projet « Premiers Pas » à Annonay (photo: Compagnie La Baraka)

Et ensuite….

Me voici avec une nouvelle famille: elle s’appelle Cie La Baraka et je suis fière d’en faire partie !

Notre avant-première des deux pièces a lieu le 25/01 au Théâtre des Cordeliers à  Annonay, puis nous serons en route pour Paris pour le festival de Suresnes où nous ferons notre première mondiale du 31/01 au 02/02. Nous enchaînerons au Théâtre de Toulon les 25-26 Mars.

Dans le cadre du projet « Premier(s) Pas », nous aurons ensuite un programme d’accompagnement, réparti entre février et septembre, spécialement conçu pour les danseurs. Il s’agit de semaines de formation dédies par exemple à la gestion et communication de projets artistiques, histoire de la danse, yoga ou bien encore du coaching professionnel.

La tournée mondiale du spectacle débutera à l’automne 2020 avec un passage au Grand Théâtre du Luxembourg, parmi d’autres, et je me réjouis d’avance de pouvoir partager ce travail dans mon pays !

Bien évidemment, comme artiste freelance, les projets continuent et s’organisent autour de mes engagements avec la Cie La Baraka. Le 03/04 je présente mon solo  “AdH(A)rA” qui fera sa première mondiale au Centre de création chorégraphie du Luxembourg (Trois-CL).

À partir du 02/05 j’entame la reprise de la pièce de théâtre “Voir La Feuille A L’Envers” de Renelde Pierlot au Théâtre d’Esch.

Pendant cette période, le collectif Lucoda que je dirige avec Giovanni Zazzera sera en préparation pour une journée consacrée à la danse en avril (date à définir) au prestigieux Cercle Cité de Luxembourg.

Donc voilà une année 2020 déjà bien remplie qui s’annonce, après de longues années de combat pour aboutir à avoir du travail constant.

Merci encore et encore à Marie-Laure Rolland de La Glaneuse pour cette opportunité d’avoir pu partager cette expérience avec vous. Je souhaite à tous les lecteurs de bonnes fêtes et que 2020 soit une année d’amour, de santé, prospérité et surtout beaucoup de danse !

Rhiannon Morgan

www.rhiannonmorgandance.com

 

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