La superproduction d’Anne Simon et Elise Schmit, All d’Déieren aus dem Bësch, d’après un conte des frères Grimm, offre une magnifique plate-forme aux danseurs.
par Marie-Laure Rolland
L’année se finit en beauté sur la scène du Grand Théâtre de Luxembourg avec un conte de Noël qui a tout pour enchanter les enfants, mais aussi les adultes. Il s’agit d’une adaptation très réussie de Frérot et soeurette (Brüderchen und Schwesterchen) des frères Grimm par l’écrivaine Elise Schmit, dans une mise en scène d’Anne Simon.
Plutôt que la traditionnelle « happy end » du mariage du roi avec une dulcinée éblouie par la vie de palace qui l’attend, la pièce incite à réfléchir aux valeurs qui donnent un sens à la vie. Il y est question de solidarité, d’amitié, de collaboration, autant de qualités qui confèrent une touche très millennial à ce récit. Certains y verront sans doute aussi un clin d’œil à la crise politique, autour du rapport Waringo, qui a défrayé la chronique grand-ducale en 2020.
Un décor pop et magique à souhait (signé Mélanie Planchard et Lynn Scheidweiler), la musique pleine de caractères et de couleurs créée par Pascal Schumacher et interprétée en live par l’Ensemble Lucilin (avec clavecin, cordes, percussions, bois et cuivres), les fabuleux costumes destructurés d’Ágnes Hamvas, un excellent casting déjanté à souhait, tout contribue à créer un univers féérique et loufoque, où les enfants vont aller remettre bon ordre.
« Du kanns si wats du wëlls »
C’est l’histoire de deux jeunes orphelins (Julie Kieffer et Dominik Raneburger) qui veulent échapper aux griffes de leur abominable belle-mère, la sorcière Madame Malfi (Nora Koenig). Ils s’enfuient dans le royaume des animaux mais Frérot n’échappe pas au sort qui le transforme en cerf. Pendant ce temps, la sorcière manigance en coulisses pour marier sa fille (Anne Klein) au roi (Philippe Thelen) et prendre le contrôle du royaume avec la complicité de ses affidés (Anouk Wagener, Raoul Schlechter, Max Thommes). Un scénario qui ne va pas se passer comme elle l’imaginait.
Six danseuses de la Junior Company CND Luxembourg (Ana-Rita Da Silva Dias, Ilenia Defendi, Claire Everling, Elisa Mergen, Alissia Parrocho, Lou Thomé) et trois danseurs professionnels (George Maikel, Aifric Ni Chaoimh et Malcolm Sutherland) figurent au casting de cette superproduction luxembourgeoise pour donner corps aux animaux de la forêt magique. Leur rôle est important puisqu’ils incarnent l’esprit de liberté et de solidarité qui règne dans la forêt, par contraste avec les luttes de pouvoir et l’avidité qui régentent le monde des humains. La recherche gestuelle, fluide et expressive, mais aussi la précision des mouvements de groupe témoignent de l’intense travail des jeunes danseuses accompli sous la direction de la chorégraphe Elisabeth Schilling.
Avec ce projet, la Junior Company entre par la grande porte sur la scène artistique, un an après sa création à l’initiative de la Confédération nationale de la danse (CND). Ces débuts vont donner des ailes aux danseuses qui auront certainement retenu la morale de ce conte : « Du kanns si wats du wëlls » !
A voir jusqu’au 23 décembre 2021. Informations et réservations en cliquant ici.