Madame Kim à la Banannefabrik 

par Marie-Laure Rolland

C’est un échange de bons procédés. Durant trois semaines, le Centre de création chorégraphique du Luxembourg (Trois C-L) a accueilli une compagnie coréenne en résidence. Début octobre, Léa Tirabasso prendra la direction de la Corée avec cinq danseurs pour présenter Toys sur la scène du Seoul International Dance Festival. A quoi peut-elle s’attendre ? Nous avons posé la question au directeur artistique Jonh-Ho Lee et à la chorégraphe Won Kim.

La rencontre a lieu à l’issue du rendez-vous mensuel du 3 du Trois, qui permet au public de découvrir des nouvelles créations ou des travaux de recherche. Won Kim est une petite femme à la silhouette fine et nerveuse qui, à 55 ans, effectue le plus naturellement du monde des figures acrobatiques au bras de son jeune partenaire, un ancien élève de l’université de Seoul où elle enseigne en free-lance. «Je m’entraîne quatre à cinq heures par jour», confie l’artiste sur laquelle le temps ne semble pas avoir de prise. Elle a débuté à 10 ans la danse classique dans ce qu’elle appelle le «western style», avant de découvrir à 13 ans le néo-classique et de progressivement s’initier à la danse moderne et contemporaine. Une formation qu’elle a approfondie au milieu des années 80 à New York.

« Western style »

Comme elle, les quatre chorégraphes du collectif TanzTheatreOnes en résidence à la Banannefabrik ont tous des parcours internationaux, que ce soit pour parfaire leur formation ou danser dans des compagnies occidentales. Cet ensemble vient de Seoul mais ceux qui s’attendaient à un zeste d’orientalisme auront été déçus.

Leur pièce, intitulée BeUNDO DoUNBE, explore les relations entre «l’être» (BeUNDO) et le «faire» (DoUNBE), en se basant sur l’improvisation mais aussi l’interaction entre les danseurs et la musique jouée sur scène. Voilà qui ne tranche pas vraiment avec ce que l’on a l’habitude de voir au Trois C-L.

TanzTheaterOnes (photo: Cie)

Won Kim nuance ce constat : «Il est vrai qu’il n’y a pas un style coréen en danse contemporaine. Notre travail s’inscrit dans une démarche en phase avec la scène internationale. La différence est plutôt dans la manière dont notre culture nous a façonnés, dont elle nous fait ressentir les choses. Notre danse en est le reflet».

Le directeur du festival SIDance, Jonh-Ho Lee, souligne pour sa part la diversité des expressions dans la danse contemporaine coréenne. Certaines compagnies restent proches de l’héritage chorégraphique traditionnel, d’autres s’en sont totalement émancipées, et entre les deux se déclinent toutes les nuances et tous les styles. D’après lui, «la Corée du Sud est le pays le plus dynamique de notre région en danse contemporaine, avec Taïwan». Il explique que la Modern Dance est arrivée dans son pays à partir des années 60, la danse contemporaine au tournant des années 1980-90.

Plate-forme de débats

Son festival, créé en 1998, est aujourd’hui l’une des plus importantes plate-forme de danse contemporaine en Corée du Sud. Il accueille durant trois semaines 20 compagnies internationales et une quinzaine de compagnies nationales.

Pour chaque édition, une thématique est mise en avant. Cette année, il s’agit de la question des réfugiés. «Les Coréens ont l’impression que ce qui se passe au Moyen Orient ne les concerne pas. Pourtant, le pays accueille chaque année environ 10.000 réfugiés. J’ai donc invité huit pièces venues d’Afrique, du Moyen Orient, des pays occidentaux ou de Corée pour essayer de susciter un débat».

C’est en 2016 qu’a été finalisée l’idée d’un échange entre le Trois C-L et SIDance, en marge de rencontres à la plate-forme européenne Aerowaves. «2018 et la première édition. Si tout se passe bien nous espérons pouvoir renouveler l’échange, peut-être dans deux ans», indique le chargé de diffusion au Trois C-L, Mathis Junet.

Marie-Laure Rolland

 

 

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