Matka, une invitation poétique au voyage

par Marie-Laure Rolland

Les vacances sont finies mais il n’est pas interdit de repartir en voyage. Après sa création en 2016 aux Rotondes de Luxembourg et la tournée qui a suivi, le spectacle pour enfants Matka a mis le cap sur le Kinneksbond de Mamer pour l’ouverture de la saison. Une belle bouffée de poésie qui enchante les enfants et oxygène les parents.

Dans le monde anxiogène et souvent cynique qui est le nôtre, certains spectacles « pour enfants » devraient être prescrits à tous sans modération. C’est le cas de Matka (qui signifie voyage en finnois), la pièce conçue par Anu Sistonen et chorégraphiée par Jill Crovisier. Durant 40 minutes, le spectateur est entraîné à la suite de trois personnages dans un périple qui lui fait traverser différentes atmosphères, musiques, rencontres, le tout émaillé de surprises féériques.

Le temps ici est élastique. Hormis quelques accélérations, rien ne presse. Cela peut impatienter les spectateurs habitués au zapping sur leurs écrans. C’est surtout une manière de s’installer dans une autre dimension. Il n’y a pas d’effets spéciaux spectaculaires ni de gros dispositif scénique ; pas non plus de dramaturgie complexe. Une petite touche de poésie, un brin de fantaisie et la personnalité des interprètes suffisent à créer le dépaysement. Cette simplicité permet de se recentrer sur ses sensations et de se débarrasser des filtres d’analyse qui plombent notre regard. Cela a l’air de rien mais c’est pourtant tout un art.

A propos de filtres, puisque décidément il n’est pas facile de s’en débarrasser: le personnage de la danseuse Piera Jovic est une gentille coquette  (forcément pour une fille). Son partenaire Antony Michelet incarne un gamin facétieux (on n’en attend pas moins d’un garçon). Cela peut sembler un brin stéréotypé. Toujours est-il que chacun tire à tour de rôle le petit chariot pour aller de l’avant ! L’équilibre se retrouve aussi dans la chorégraphie qui instaure un dialogue à jeu égal entre les danseurs,  ou encore dans leurs interactions avec l’artiste de cirque Max Hinger.

La création musicale de Emre Sevindik joue un rôle à part entière dans cette pièce. Elle en fixe le cap géographique. À  l’ambiance tropicale, où résonnent les bois et le ruissellement de l’eau, succèdent le froid mordant du blizzard, les harmonies orientales ou les réverbérations cosmiques. La création lumière signée Elric Vanpouille sculpte l’espace et souligne la dimension onirique de ce voyage d’exploration qui est aussi, somme toute, une exploration de soi-même et de l’autre.

Marie-Laure Rolland

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